Tout le monde y pense, personne n’en parle. Ceux qui en ont en ont honte.
Ceux qui n’en n’ont pas ont honte de ne pas en avoir.
Et sur ce sujet, beaucoup se posent la question : «Suis-je «normal(e)» ?
Si les fantasmes sexuels font couler beaucoup d’encre (virtuelle ou non), ils ne sont pratiquement jamais abordés sous l’angle du développement personnel.
Pourtant, ils sont porteurs de messages précieux qui pourraient nous permettre d’avancer vers notre plein épanouissement.
Alors, si nous écoutions ce qu’ils ont à nous dire ?
Si nous essayions de comprendre sur quel chemin ils souhaitent nous mener ?
Mais commençons par le commencement…
Que signifie le mot « fantasme »?
La traduction du mot allemand «Phantasie», inventé par Sigmund Freud est la combinaison des deux mots «Phantasme» qui signifie «hallucination» et «Fantaisie» qui est la «capacité à imaginer».
Selon l’analyse de Freud, les fantasmes seraient l’expression des pulsions profondes de l’individu. Ils auraient une fonction compensatoire : ils permettent de réaliser dans le monde imaginaire les désirs refoulés du sujet.*
Pour la psychanalyse, le fantasme est une production purement illusoire qui ne résisterait pas à une appréhension correcte de la réalité et parce qu’il traduit une fixation au stade oral ou anal, il est le résultat d’une régression.**
Waouw ! Nous serions donc vraiment tous névrosés 😉
Pour la sexologie, le fantasme est un des moyens de faciliter l’excitation sexuelle.
« Psychologiquement, fantasmer est l’une des méthodes qui permettent de faire le vide en soi afin de se concentrer sur un objet sans en être distrait par des pensées parasites. Et beaucoup d’absences d’orgasme ou de perturbations de l’érection sont causées par l’impossibilité d’oublier les soucis, les obligations, les problèmes sexuels éventuels, les enfants dans la chambre d’à côté, etc., afin d’être totalement immergé dans le jeu sexuel.
L’apprentissage délibéré de l’usage de fantasmes peut se révéler une très bonne solution aux troubles que certaines personnes éprouvent dans la rencontre érotique.»***
Notre imagination peut donc nous aider à nous déconnecter de notre mental qui est un gros obstacle à la détente nécessaire à une sexualité épanouissante.
Encore faut-il que nous nous donnions l’autorisation de fantasmer.
Autorisation que nous allons pouvoir nous donner si nous comprenons que les fantasmes sont des messages de notre âme qui nous guide dans notre évolution. Mais comment nos fantasmes pourraient-ils être des messagers ?
Nos blessures d’enfance nous divisent en 2 parties.
Lorsque nous venons au monde, nous sommes rapidement confrontés aux limites de nos parents et donc à l’amour conditionnel.
Il y a des choses qu’ils aiment et d’autres qu’ils n’aiment pas, ils supportent bien certains de nos traits de caractère et il y en a d’autres qui leur sont intolérables…
Nous apprenons vite quels comportements nous valent les sourires, les câlins, l’affection et quels autres comportements déstabilisent nos parents et nous apportent des reproches voire des punitions.
Tôt ou tard, nous subissons une (ou plusieurs) des 7 blessures de base : rejet – privation – abus – abandon – négation – dévalorisation – trahison
Afin d’éviter cette blessure, nous nous efforçons de ne montrer que les parties de nous qui semblent dignes de l’amour et de cacher les parties de nous qui risquent de nous faire perdre l’amour de nos parents. Car, quel que soit le type de blessure, pour l’enfant, elle représente toujours la perte de l’amour.
Nous nous divisons donc en deux parties : d’un côté la Lumière (= partie de nous que nous jugeons «bonne» et que nous mettons en avant, sous les projecteurs) et, de l’autre côté l’Ombre (= partie de nous que nous jugeons «mauvaise» et que nous cachons).
Nous construisons notre personnalité en essayant de développer au maximum notre Lumière et en essayant de supprimer notre Ombre.
Et nous avançons alors dans notre vie en développant certaines caractéristiques et en essayant d’en étouffer d’autres.
Où est le problème ?
Tout le monde dira que c’est positif de vouloir développer nos «bonnes» parties et de vouloir supprimer nos «mauvaises».
Oui, sauf que…
Souvent, les parties de nous que nous manifestons sont des pièges qui nous limitent et nous enferment. Et les parties de nous que nous reléguons dans l’ombre sont des qualités qui pourraient nous être très utiles.
Une femme me racontait à quel point elle était fière de ce qu’elle était devenue…
Elle connaissait une belle réussite professionnelle avec beaucoup de responsabilités, son couple était harmonieux, ses enfants étaient «parfaits»…
Tout cela, me disait-elle, elle l’avait construit grâce aux qualités enseignées par ses parents : l’organisation, la rigueur, la prévoyance, la volonté…
Et pourtant, elle sentait que, bien qu’ayant tout pour être heureuse, elle plongeait dans une grosse dépression.
Lorsque je lui ai demandé quel était son fantasme sexuel le plus puissant, elle a tout d’abord été très étonnée…
Puis, elle m’ a livré que ce qui lui faisait le plus d’effet, c’était d’imaginer qu’elle était attachée, soumise à la volonté d’un homme autoritaire qui pouvait faire d’elle tout ce qu’il souhaitait.
En même temps, elle avait honte d’elle-même dans ce rôle de femme soumise et elle s’efforçait de balayer ce fantasme dès qu’il apparaissait.
Le contraste entre la réalité dans laquelle elle se montrait plutôt dominante et son fantasme dans lequel elle adoptait une position complètement passive montrait à quel point le fait de tout prendre en mains, de tout contrôler, de tout gérer finissait par l’épuiser. Elle aspirait inconsciemment à lâcher-prise, à laisser aux autres certaines responsabilités, à ne plus être le moteur de réussite de tous les projets et à se laisser mener par quelqu’un qui prendrait les décisions.
Dans cet exemple, on comprend que le fantasme de cette femme lui montrait ce qu’elle avait besoin de développer pour que sa vie soit plus équilibrée, plus épanouissante.
En cessant de repousser son fantasme et en acceptant qu’il puisse être porteur d’un message essentiel, elle a pu se réconcilier avec la dimension de passivité qu’elle rejetait dans son Ombre (puisque contraire aux valeurs acceptées par ses parents) et re-créer sa vie d’une manière bien plus épanouissante car libérée des conditionnements de son éducation.
Vous trouverez ci-dessous un tableau reprenant les 7 catégories de blessures et les caractéristiques mises dans l’Ombre et dans la Lumière pour chacune de ces catégories.
Nos fantasmes révèlent nos potentialités cachées
Puisque nous croyons que seule notre Lumière est digne d’amour, nous nous interdisons de manifester les caractéristiques inverses que nous jugeons mauvaises.
Mais au fil du temps et des expériences, nous constatons que, malgré tous nos efforts pour l’éviter, nous revivons sans cesse la répétition de notre blessure et cela aussi bien dans nos relations amoureuses que dans tous les autres volets de notre vie.
La personne qui est porteuse de la blessure d’abandon a beau donner tant et plus, elle vit des relations où elle est toujours abandonnée.
Et c’est principalement parce qu’elle donne trop et attend trop de reconnaissance que l’autre l’abandonne.
La personne qui est porteuse de la blessure de dévalorisation multiplie les efforts pour être parfaite, mais sa rigidité finit par faire fuir l’autre et elle en conclut qu’elle n’a pas assez de valeur pour mériter l’amour.
Ainsi, la personne qui est porteuse de la blessure d’abandon et qui se sacrifie pour les autres s’imaginera dans des scénarios où elle est le centre de l’attention de son partenaire sexuel, voire de plusieurs partenaires simultanément qui n’auront d’autre objectif que celui de s’occuper d’elle.
La personne porteuse de la blessure de dévalorisation et qui vise à être parfaite en respectant les règles s’imaginera faire l’amour dans des lieux interdits ou sera très stimulée en créant une scène dans laquelle elle soumet, par le plaisir sexuel, un partenaire symbole de l’autorité.
Mes exemples sont sans doute un peu caricaturaux…
L’imaginaire humain est plus riche, plus créatif encore… Et chacun ajoute des détails personnels…
Ce qui est important de comprendre, c’est que nos fantasmes nous montrent les potentialités que nous n’utilisons pas mais que nous avons besoin de développer.
Dans les tableaux ci-dessous, vous trouverez quelques exemples des fantasmes les plus fréquents et les caractéristiques réprimées qui y correspondent.
L’énorme succès du livre «Cinquante nuances de Grey» a dévoilé au grand jour un fantasme que les femmes avouent rarement : celui de la domination.
Il est quand même important de noter qu’il s’agit de domination avec un homme très beau, très riche et très amoureux. L’héroïne ne fantasme pas sur le fait d’être dominée par un SDF, moche et maltraitant… La part du prince charmant mythique est donc non négligeable.
Je ne pense pas non plus qu’il faille interpréter cela comme une tendance cachée au masochisme de la part des femmes.
Par contre, je crois que c’est révélateur de la situation sociale actuelle post-féminisme dans laquelle les femmes ont appris à manifester leur énergie masculine et ont donc une position de pouvoir dans de multiples domaines.
Le succès de ce roman réside donc, à mon avis, dans le besoin inexprimé des femmes de pouvoir exprimer à nouveau leur énergie féminine plus réceptive, plus intuitive, plus suiveuse qu’agissante et de retrouver des hommes qui assument leur énergie masculine d’action dans un cadre d’amour et de respect. (Mais ceci est un autre débat).
Est-il nécessaire de réaliser ses fantasmes sexuels ?
Il n’existe pas de règle générale qui serait valable pour tout le monde et pour tous les fantasmes. Certains fantasmes pourront être réalisés sans être destructeurs pour la personne ou pour le couple éventuel. D’autres présentent plus de risques.
L’essentiel, selon moi, ne se situe pas dans la réalisation concrète ou non du fantasme mais bien dans ce que nous avons la possibilité d’en comprendre sur nous-mêmes et sur nos besoins profonds. Et cela afin de mettre en oeuvre les changements nécessaires au sein même de notre vie quotidienne.
Réaliser un fantasme sans en comprendre le sens risque d’aboutir, soit à la déception, soit au besoin compulsif de le réaliser encore.
Si vous êtes une femme qui fantasme sur un scénario avec deux hommes, il serait intéressant de vous demander si vous n’auriez pas une tendance excessive à prendre soin des autres en vous négligeant vous-même… Votre fantasme est un message qui vous invite à oser prendre soin de vous également et de veiller à rétablir l’équilibre entre donner et recevoir.
Si vous êtes un homme qui fantasme sur un scénario où vous dominez une femme que vous voyez comme libre, indépendante voire dominante, il serait intéressant de vous demander si, dans votre vie quotidienne, vous n’adopteriez pas trop souvent une attitude effacée et soumise, vous sentant écrasé par les autres. Votre fantasme montre que, secrètement, vous aspirez à vous affirmer plus en tant qu’homme, à oser vous faire entendre et à prendre les commandes de votre vie.
Plutôt que de considérer nos fantasmes comme les reflets d’une partie honteuse de nous-mêmes, plutôt que de se contenter de les utiliser uniquement pour augmenter notre désir (puis de les remettre au placard), nous avons la possibilité d’en recevoir des enseignements précieux sur nos blessures et sur leurs conséquences dans nos comportements quotidiens…
Si nous écoutons ce qu’ils ont à nous dire…
Et que nous en apprenons à devenir plus complets, en réunifiant notre Ombre et notre Lumière et en exprimant toutes nos potentialités de manière équilibrée, sans excès d’un côté ou de l’autre.
Comment relier sexualité et spiritualité ?
A mes yeux, toute spiritualité, quelle qu’elle soit, a pour objectif d’apprendre à aimer de manière inconditionnelle car c’est la nature de notre âme que d’aimer inconditionnellement.
Mais pour réussir à aimer l’autre inconditionnellement, nous devons commencer par nous aimer nous-mêmes sans condition, dans notre totalité. Et cela signifie d’apprendre à aimer aussi toutes ces parties de nous que nous avons reniées, enfermées dans notre Ombre suite à nos blessures, par peur de perdre l’amour.
Lorsque vous vous aimerez dans votre totalité, alors, non seulement vous pourrez aimer l’autre dans sa totalité, mais, de plus, vous attirerez dans votre vie la personne qui sera capable de vous aimer inconditionnellement.
Vos fantasmes peuvent donc vous aider à avancer vers une vie plus riche, plus proche de vos besoins profonds et vous permettre de construire une relation amoureuse plus épanouissante. Alors, osez écouter ce qu’ils ont à vous dire !
Dr. Véronique Baudoux
www.veroniquebaudoux.com
Si vous souhaitez en savoir plus sur la manière de réconcilier sexualité et développement personnel, vous trouverez la version numérique de mon livre Divine sexualité en cliquant sur ce lien : http://veroniquebaudoux.com/evenements/divine-sexualite-l-ebook/
Sources :
* La revue des sciences humaines, numéro 91 : Voyage au pays des fantasmes : du rêve à l’imaginaire. Par Jean-François Dortier.
http://www.scienceshumaines.com/voyage-au-pays-des-fantasmes-du-reve-a-l-imaginaire_fr_10656.html
** Réseau savoir.fr
http://psychologie.savoir.fr/les-fantasmes/
*** Le Plus, Nouvel Observateur : Fantasmer est-il normal ? Par le Dr Yves Ferroul, sexologue.
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1277500-fantasmer-est-il-normal-bien-sur-c-est-meme-un-tres-bon-remede-aux-problemes-sexuels.html